dimanche 16 novembre 2008

A bout de souffle ! Episode un

« C’est quoi la vie » ? Un vaste programme ! On s’est souvent interrogé sur sa signification, son but, ses codes. Beaucoup moins sur une définition : « vivre, c’est quoi ? ».

Pour illustrer cette difficulté à définir ce concept, rappelons-nous les dires du fameux docteur Simonet, qui affirmait ne pas être en mesure de donner une définition, tout biologiste cellulaire qu’il fut. C’est un comble ! Même lorsqu’ils cherchent à la qualifier, les médecins buttent sur un os : « Quand est-on mort ? Quand est-on vivant ? » A la rigueur, religieux et philosophes parviennent mieux à donner une réponse claire…mais ces réponses sont infiniment variées, trop pour qu’on y revienne.

En des temps reculés, dans un contexte effacé de ma mémoire, j’ai entendu le concept de vie décrit par une triptyque : « Respiration, Alimentation, Reproduction. »

Chapitre 1 : Respiration : ne pas mourir !


(Précision : je distinguerais cette notion de « ne pas mourir » de la survie par une considération temporelle : ne pas mourir, c’est la « Survie Urgente ».)

Par quoi commence l’existence dans le genre humain ?
Le nouveau-né, dans un cri, met en service ses poumons neufs, afin de déclencher le processus respiratoire. S’il ne le fait pas, il meurt. N’est-ce pas la preuve que la vie a pour première phase une certaine forme de précarité ? La vie commence par une menace de mort violente.

Comment ? La vie intra-utérine qui précède contredirait cela ? C’est loin d’être évident ! Dès les premiers instants de sa vie, l’embryon traverse une période critique où il respecte la règle « du tout ou rien ». Comprends par là qu’il ne tient qu’à un fil, et s’il perd trop de cellules, il est cuit ! L’œuf est cuit, mais s’il passe le cap, ses chances s’améliorent avec le temps.

On voit donc que le premier travail du vivant consiste à assurer un minimum littéralement vital. Ce n’est que dans cette condition que le vivant pourra passer à l’étape suivante ; tout en gardant à l’esprit que tout manquement au minimum vital le replacerait dans cette situation de « ne pas mourir » !

Le phénomène respiratoire représente au mieux cette étape de la vie.
On a déjà évoqué la première bouffée d’oxygène du nouveau-né, remarquons également l’expression désignant le décès : « Rendre son dernier souffle »…
Une respiration sereine est témoin de bonne santé ; alors qu’un rythme lent, ou au contraire trop rapide tient du pathologique.
Les bougies que l’on souffle pour son anniversaire, le souffle qui s’emballe lors de la menace d’une mort imminente, et le soupire de soulagement une fois celle-ci passée…

« Ouf ! » … A bout de souffle… Ce qui arrive quand l’être faiblit. Même une fois l’état d’urgence passé, le premier réflexe n’est-il pas d’inspirer lentement, comme pour s’assurer la pleine fonctionnalité du métabolisme le plus essentiel ?

Bien sûr, tu me diras « Bah ? Et le cœur ? » ou encore « Le sang, c’est la vie ». Certes ! Mais à quoi sert le sang, si ce n’est à transporter les gaz ? Éviter que l’organisme ne s’étouffe ? Et on aura beau dire, le cœur est intimement lié aux poumons par la petite circulation, mais aussi souvent dans leurs rythmes respectifs : quand l’impératif de ne-pas-mourir se fait pressant, le cœur s’emballe solidairement des poumons, et réciproquement si l’organisme ne craint pas de mourir, l’un comme l’autre sont « au repos ».

De nos jours, nous avons appris à confondre « ne pas mourir » et « survivre ». La « faute » à un monde où la maladie recule et où la nourriture abonde pour le plus grand monde. La mort est une inconnue qui vit très loin de chez soi jusqu’à ce qu’elle vienne frapper à sa porte. A moins d’être à la rue, on ne sait plus la différence entre ne pas mourir et survivre. Ne pas mourir semble un acquis dans un pays à la médecine moderne, où on ne meurt plus de la tuberculose, où l’hôpital peut même ramener certains morts « à la vie ». On pense que le premier pas pour ne pas mourir consiste à se mettre quelque chose sous la dent, à « gagner sa croute », alors qu’il s’agit de la deuxième étape « survivre ».

Survivre et ne pas mourir ont donc acquis dans nos têtes d’occidentaux une signification identique, les deux n’étant à priori qu’une formalité. Je doute cependant que quiconque qui soit confronté à une menace de mort violente (ce qu’on appelle candidement « accident ») jugerait cette différence comme une simple nuance. Ma remarque vaut aussi pour les quelques déshérités de nos régions qui ne sont pas assurés au quotidien de la satisfaction de besoins de survie comme manger et se loger. D’ailleurs, à ce propos, pour bien illustrer que le « ne pas mourir » précède LARGEMENT le « survivre », confrontons un peu ce jeune accidenté de la route (ou ce vieux emporté en quelques jours seulement par une « bête » grippe) et ces clochards qui galèrent dans les rues pour subvenir à leurs besoins… Parmi tous ces gens, qui est mort, qui ne l’est pas ?

Ce papier est un appel à l’humilité. Avant de faire des grands projets de quel sens donner à la vie, rappelons-nous que nous ne sommes qu’un gros amas de carbone et d’eau fragile. La monnaie universelle n’est pas le dollar, mais l’oxygène.
Alors, avant de survivre, inspirons un grand coup, et passons au chapitre suivant !

(A suivre)

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