samedi 28 juin 2008

Le bathyscaphe

Ou l’ivresse des profondeurs…














« O doc, quoi c’est un bathyscaphe ? » « Regarde donc en haut mon petit. Le bathyscaphe est un engin d’exploration abyssale inventée par Jacques Picard. »

Chapitre 1 : En plongée !

Et voilà, en un instant, la surface de la mer s’éloigne. A quarante mètres déjà, on n’y voit plus rien. Les couleurs disparaissent… Pourtant, l’objectif est beaucoup plus loin, le record est à 11 000 mètres.
La plongée est un chemin sinueux, la descente lente et laborieuse, la pression de l’eau alentours gène la progression et menace de sa pression étouffante l’imprudent explorateur. Bientôt, les abysses deviennent ténèbres et s’étendent à l’infini. Cela ne reflète guère l’espoir, mais le courageux navigateur dispose de son bathyscaphe ! De quoi rendre cet environnement hostile plus supportable, et de profiter du paysage abyssal après l’avoir éclairé de la lumière intégrée dans l’engin.
La performance de cette plongée lointaine n’est pas la seule couronne sur la tête du pionnier. Outre l’agréable sensation de fouler un sol inconnu où planter son étendard, d’aborder une nouvelle frontière qui lui permettra de s’évader comme personne ne l’a put avant lui ; l’aventurier sera récompensé par divers trésors, épaves sous-marines et poissons mystérieux. Voir même un gisement d’énergie fossile s’il est en veine !

Chapitre 2 : Allô bathyscaphe ? Ici la terre !

Bien sûr, on ne peut être nombreux à bord du bathyscaphe, deux ou trois personnes tout au plus… et une fois l’engin parti sonder les profondeurs, on ne le devine même plus. Quand bien même on suivrait le sous-marin, à quoi bon, puisque sans le bathyscaphe, les profondeurs ne sont que ténèbres et obscurité.

Il ne reste plus qu’à attendre que les pionniers remontent et rapportent avec leurs mots ce qu’ils ont vu au fond… libre à eux de travestir la réalité de leurs observations. Eventualité aussi, celle de voir les aventuriers bien incapable de communiquer avec des mots simples la complexité de l’univers qu’ils ont aperçu en bas… Et quand l’émotion vient se mêler au rapport purement objectif, l’exercice de rédaction du carnet de bord de la virée en sous-marin n’en devient que plus ardu !
Le commandant n’a plus alors que le choix des armes pour populariser ses découvertes, soit le compte-rendu objectif et scientifique, soit son autobiographie (pour évoquer sa découverte par le biais de son vécu, de son expérience…) soit enfin une parabole (métaphore philosophique, message caché…). Trois visions, trois approches de la communication de la « connaissance ».

Chapitre 3 : Mon carnet de bord

En tout état de cause, difficile de ne pas privilégier une des trois formes d’expression. Tout le monde a bien son art préféré, n’est-ce pas ?
Les gens qui connaissent bien le Doc, Piti shââ et Baptistisime connaissent aussi mon goût pour les métaphores élaborées et bien brodées, les énigmes, les devinettes détournées, les symboles judicieusement choisis, et SURTOUT les paroles sibyllines croisées avec un vocabulaire volontairement incompréhensible.
Que voulez-vous, l’ivresse des profondeurs, c’est-cela. « Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? » Le superficiel, très peu pour moi. La curiosité, la vraie, celle qui nous invite à ne pas nous satisfaire d’un vague brouillon et à évoluer avec plus de passion, voilà un bon moteur pour bathyscaphe. Dans un monde où toutes les frontières de l’inconnu semblent avoir été repoussées, où tout a déjà été inventé, il n’y a plus qu’en profondeur que l’on peut gagner, pour émoustiller nos ingénieux esprits et découvrir des choses nouvelles et de nouvelles choses. Les canevas ne demandent qu’à être davantage filer, les explorateurs de demain devront s’armer de courage et d’une bonne pelle, et CREUSER !
« Ce qui embellit le désert, c'est qu'il cache un puits quelque part… ». Tous les déserts ne sont pas brûlants, même l’océan peut paraître tel un désert de part son immensité et son « aridité ». Le puits est une belle image : ne parle t’on pas de « puits de science » ? Tu sais, cet objet infiniment profond, d’où l’on peut remonter de l’eau, à condition d’avoir creuser le sol du désert, puis d’avoir fait remonter le seau à la force de ses bras.

Décryptage et conclusion :

A l’heure où tout va à 100 à l’heure, j’exige le luxe de prendre le temps de bâtir une exploration solide et en profondeur. Moi aussi, je veux suivre Picard et St Ex’, et ce n’est pas en restant sur ma chaise longue en bord de mer et en jetant un coup d’œil distrait et rapide sur l’onde que je vais y parvenir !
Mon monde intérieur comporte lui aussi ses abysses, ses déserts, et ses puits. Une fois la surface crevée, je suis dans mon élément, dans ma tour d’ivoire… Un tel volume de continents inconnus à explorer implique trop de choses à rapporter. Tant que l’introspection ne sera pas un objet soumis aux règles de la cartographie, je ne pourrai retranscrire mes voyages que par la voie de la plume, les paroles s’envolant et venant bien trop lentement pour restituer avec fidélité le volume des trésors que je souhaite sauver de l’inexistence.
Artistes incompris, écrivains visionnaires, philosophes de la rue, faux prophètes, tous sont des riches propriétaires d’idées, de réflexions inédites, souvent profondes et donc complexes. Le message gagne alors à être imagé. C’est ce que je crois, c’est pourquoi je laisse ma plume s’abandonner à la métaphore plutôt qu’énoncer des vérités toutes crues qui flirteraient avec l’intransigeance dans leurs propos. Certains y verront de l’hypocrisie « mais arrête de tourner autours du pot, exprime toi clairement, bordel ! », d’autres une certaine forme de rêverie.
A cela je serais tenté de répondre justement par l’image développée dans l’ensemble de ce papier.
Baptistisime « Qui pour une balade en sous-marin ?! Qui m’aime me suive ! Haha ! »
Piti Shââ « Il suffit de creuser un peu pour que l’eau remonte du puits. Il suffit de tirer sur le fil pour que le bathyscaphe refasse surface, miaou ! »



jeudi 19 juin 2008

La contrainte

Chapitre premier : D’où vient la contrainte ?

Elle énerve, elle enchaîne, on voudrait s’en libérer et pourtant on ne peut lui échapper. La contrainte est une force qui s’applique sur les êtres humains et oriente leurs conduites à l’insu de ce qu’ils voudraient. Si ce syndrome sentimental qui résulte du fait de devoir faire ce qu’on ne veut pas est toujours un peu le même (agacement, lassitude…) les origines de la contrainte peuvent être très diverses. Les premières sont les lois de l’Univers et du vivant. Difficile d’aller à l’encontre de ce que dictent la nature et le hasard dans nombres de cas, avouons qu’un tronc d’arbre dévalant une pente dans notre direction à vive allure a tendance à décider à notre place de nos tout prochains mouvements, pas vrai.

En plus des contraintes (supra)naturelles citées à l’instant, n’oublions pas que la contrainte peut naître d’autrui. « L’enfer c’est les autres » disait l’autre. Il serait bon cependant de distinguer la contrainte induite par les autres de la contrainte induite par l’autre. Dans le premier cas je pense plutôt aux lois des hommes, les règles qui régissent la société. Dans le second, la force contraignante utilisée par une personne A pour obtenir d’une personne B que B adapte sa conduite selon le désir de A s’appelle pouvoir, et je n’en parlerai pas dans la démonstration de ma pensée aujourd’hui.

Enfin, la pire force contraignante correspond aux besoins de l’individu. Désirs et objectifs, idéaux et principes moraux ont souvent tendance à agir pour nous, même si cette contrainte qu’on pourrait qualifier de « personnelle » puisqu’infligée par l’Homme sur lui-même, découle souvent du type de contrainte décrit dans le paragraphe précédent.

Alors, avant de voir ce que fait la contrainte dans notre Univers, notons d’abord qu’elle en est un des piliers principaux. Le monde connu aurait une tout autre allure si l’électron de l’atome d’hydrogène n’était pas attaché de force au proton et au neutron. La matière n’existe que par diverses forces contraignantes. Sans la gravitation le vide serait encore plus vaste qu’il n’est et les astres se sentiraient bien seuls dans le vaste cosmos. Déjà un intérêt de la contrainte, mais peut être parait-il bien éloigné ?

Chapitre 2 : Pourquoi se prendre le chou ?

Si on s’approche un peu plus de nous, humains, la contrainte apparait comme une nécessité dans tous processus de construction. Je m’explique. Pensons d’abord à la physique mécanique où l’on voit que ce sont les forces de frottement qui permettent le mouvement de tout objet (dans le vide on ne peut pas marcher, sisi, je le jure !). C’est parce que la lune nous tombe en permanence sur la tête que nous avons un satellite naturel sans qui il n’y aurait point de marées. En architecture, l’équilibre d’une bâtisse n’est possible que grâce à des contraintes réciproquement imposées par les éléments de la structure les uns envers els autres, et qui doivent se compenser pour que l’édifice reste debout.

Par ailleurs, fonder une société, une famille, le problème reste le même : un objectif signifie un résultat, un résultat signifie les moyens mis en œuvre pour l’atteindre. C’est bien beau d’avoir du ciment, des briques, une truelle et un terrain constructible, ce n’est pas pour cela que le mur se dressera tout seul.

Pour ériger un beau mur, il faut un intermédiaire que sera le maçon, qui subira une contrainte pour mettre en œuvre les ingrédients invisibles que sont son savoir-faire, sa force de travail et le temps qu’il consacre à son ouvrage. Même s’il est le capitaine, et le plus contraint, il n’empêche que devront se soumettre à certaines contraintes les autres acteurs susnommés. Ca lui ferait une belle jambe au maçon, si la truelle se brisait ou si les briques refusaient de tenir en place !

Alors, dans cet univers bâtit autours de contraintes, et où les mortels sont bien souvent contraints à « bâtir » (ne serait-ce que pour leur survie), l’accomplissement de chaque projet passe par une quantité donnée de contrainte totalement incompressible propre à chaque tâche.

Exemple un : Tu as faim. C’est une certaine forme de contrainte imposée par ton organisme et les lois de la nature. Cette contrainte sera le moteur d’un projet : satisfaire la faim. Mais ce projet implique une autre forme de contrainte : « corvée de cuisine ». Deux cas de figure : sois tu acceptes cette activité contraignante et tout ce qu’elle implique, soit tu esquives, et dans ce cas il faudra faire avec la contrainte initiale « faim ».

Exemple deux : Ta piaule est en bazar, un vrai chantier insalubre qui fait que les champignons toxiques commencent à pousser ça et là, rendant la survie de tout être humain normalement constitué incertaine à brève échéance. Le même choix se présente. Dans le premier dénouement possible, tu prends ton courage et ton balais à deux mains, et tu te contrains au ménage. Bien. Dans le second cas, tu laisses filer, et là ton (ta) conjoint(e) t’engueule et prend le balai pour faire la corvée à ta place. On pourrait croire que la contrainte a « disparu », mais elle n’a effectué qu’un simple transfert d’une personne à l’autre.

Un peu à la manière de la loi capitale de la chimie « Rien ne se perd, rien ne se créé, tout se transforme », la contrainte est incompressible. On ne peut que la convertir pour s’en débarrasser. Juste esquiver ne fera que la faire renaître sous une forme plus tard, ou la transmettra à quelqu’un d’autre, tout ça du fait qu’il y ait des projets et des besoins. Et comme tout nécessite un certain nombre de « points de contrainte » qu’il faudra fournir d’une manière ou d’une autre, impossible de se soustraire de la contrainte. Au contraire, la fuite est même une bonne matière de générer de la contrainte supplémentaire sous forme de frustration chez la personne qui se voit refourguer la contrainte d’autrui !

« L’enfer, c’est les autres ». La société peut être vue comme une prison, édifice stable s’il en est, qui tient debout grâce aux contraintes réciproquement imposés entre ses piliers que sont les membres qui la constituent. Faut-il s’évader de cette contrainte ou sommes-nous condamnés à perpét’ ? Quels rapports la contrainte et la liberté entretiennent-ils ?

Chapitre 3 : Contrainte et liberté :

Qu’on se le dise tout de suite : non seulement la contrainte est le moteur de nos réalisations, mais également une des clefs de notre liberté !

En effet, que serait la liberté si elle ne s’opposait à la contrainte ? Un peu comme droits et devoirs, bien et mal, ce genre de dualités éternelles entre concepts qu’on ne pourrait définir l’un sans l’autre, sans opposer l’un à son contraire.

Si tout se passait sans qu’on soit contraint à lever le petit doigt, où serait notre libre arbitre ? Notre sens critique ? Notre fierté à accomplir et à s’accomplir ?

S’il n’y avait aucune règle imposée par les lois de la physique, les lois de la nature et les lois des hommes, comment l’Homme pourrait-il être acteur de son environnement et à fortiori de son destin ? La vie serait « un long fleuve tranquille » où l’humain serait son propre spectateur, impuissant et asservi au hasard, au « déterminisme divin ». Les dieux soient loués, ce n’est pas le cas, et les contraintes de toutes sortes sont autant de lions qu’il nous est donné de dompter ! Sors ton chapeau et ta boussole, l’Univers est un terrain de jeu, jeu dont le but est de maîtriser les règles. Pour qu’il devienne passionnant ! Sans règle, un jeu serait bien vide de sens…

Qui dit jeu, dit stratégies et coups gagnants. Comment jouer malgré des règles imposées ?

Chapitre 4 : Contrainte et stratégies

Le jeu a assez duré. Ce que je vois aujourd’hui, c’est que la contrainte n’est pas à la mode. Tout en existant insidieusement, la contrainte des hommes essaye de se rendre invisible pour mieux vendre des idéaux de « liberté », de quiétude qui naitrait de l’affranchissement envers la contrainte. Alors, en relisant ce qui précède je me rends bien compte que ce serait illusoire, pourtant se plier à la contrainte n’a pas la côte.

On voit ainsi des stratégies d’évitement qui, en invoquant l’hédonisme, consistent à affirmer son pouvoir sur la contrainte en toute occasion. Le principe : celui de plaisir, de l’instantané. Moins de responsabilités liées à la construction, c’est moins de contrainte pour soi (après les autres ils font ce qu’ils veulent, s’ils se chopent les contraintes écartées lors de ce plan, tant pis pour eux. Ils avaient qu’à avoir la « pas prise de tête attitud’ »). Pourquoi s’embêter alors que nous sommes libres ? La vie est simple, pourquoi se prendre la tête ? Service minimum, et contentons-nous de notre médiocrité.

A l’inverse, on en voit des perfectionnistes/élitistes répondre à la contrainte de manière systématique. Responsabilités, construire et se construire passe par un labeur intensif. Il faut, il faut, il faut.

Si on devait dresser un bilan très personnel… je dirais qu’entre une attitude où on ne s’impose rien et où on sera ni fiable ni à même de faire dans le durable et une autre qui serait son opposée, il faut trouver le juste milieu. Quelqu’un qui accepte tout sans broncher et qui veut trop bien faire se ramassera forcément un jour ou l’autre, c’est l’archétype du pigeon trop bon trop con. Comme le nombre trois est mon nombre fétiche, voyons le 3e portrait possible. Si au lieu de rejeter systématiquement les contraintes, au lieu de les accepter sans discuter, on pesait le pour et le contre à chaque fois qu’une force contraignante pointait le bout de son nez ? Ca parait pas mal, non ? En fait ce personnage serait aussi pénible aussi, à vouloir toujours négocier ! Il serait moins prévisible que les deux précédents, mais il serait impossible à manœuvrer, et une telle conduite serait fatigante pour lui-même.

Je pense qu’il FAUT avoir une attitude raisonnée et pas extrémiste face à la contrainte. Certains besoins sont impératifs, certaines responsabilités doivent être assumées. D’autres choses ne valent pas le coup qu’on dépense le moindre brin d’énergie pour elles. A chacun de faire ses choix sur un sujet de Fil Eau beaucoup plus vaste : « Qu’est-ce qui importe VRAIMENT ? » Vaste programme, s’il en est. C’est une autre histoire. Allez, bonsoir les jeunes.

Docteur G.

La pensée psychanalytique du jour par Baptistisime : « Moi aussi je peux m’y mettre ! Tu veux quoi ? C’est pas mon problème ! Chacun sa merde ! Me prends pas le chou ! Va mourir ! Mwhahaha ! »